PRÉSENTATION

Dans la province reculée de Cabo Delgado, tout au nord du Mozambique, se trouvent des communautés de pêcheurs parmi les plus pauvres du pays. Et depuis plusieurs années les captures baissent. Le projet Our Sea Our Life (OSOL) travaille avec ces communautés vulnérables pour utiliser de manière durable les ressources marines, notamment via la création d’aires marines protégées gérées localement.

LE PROJET EN DÉTAILS

Arrivée au Nord

Après Tofo, nous devions voyager vers le Nord, au niveau de la frontière tanzanienne, de la manière la plus économique possible. Et essayer d’en profiter pour faire quelques stops pour voir les paysages magnifiques que le pays offre. Plus facile à dire qu’à faire vu que le Mozambique est une bande côtière de 2500 kilomètres et que nous partions du Sud !

Vous retrouverez tout notre voyage dans l’article général mais pour faire court, cela nous a pris plus d’une semaine en voyageant par différents moyens de transport et en s’arrêtant. Pour cette parenthèse, nous nous sommes arrêtés à Ilha de Mozambique. C’était la capitale du pays sous l’occupation portugaise. Sur cette île, au milieu de bâtiments coloniaux qui tombent en ruine et de bidonvilles, le temps semble s’être arrêté. Si vous allez au Mozambique, il faut absolument y passer !

Nous devions rejoindre Pemba, la plus grande ville du Nord, pour rencontrer AMA. Associaçao do meio ambiente, une ONG locale partenaire du projet OSOL. Après 11 heures dans un mini bus local et quelques sueurs froides, nous sommes arrivés en ville pour rejoindre Thomas, le directeur d’AMA. Il voulait surtout voir qui étaient ces deux jeunes qui avaient traversé le pays pour venir ici, et juger si nous pouvions aller dans les villages de pêcheurs. Nous sommes justement partis le lendemain matin avec lui pour voir une communauté non loin de Pemba et filmer l’interview de Thomas.

Le test était passé, il a donné son accord pour que nous rejoignons Mocimboa de Praia le lendemain pour rencontrer Jeremy, le coordinateur de tout le projet OSOL.

La route le lendemain était exceptionnelle. Non seulement la voiture d’AMA était beaucoup plus confortable qu’un bus local mais surtout nous avons traversé le parc national des Quirimbas, croisé des bandes de singes et même eu la chance d’assister à un coucher de soleil sur la savane.

En arrivant à l’auberge locale à Mocimboa de Praia, nous rencontrons Jeremy. Nous passons la soirée à préparer la semaine que nous allions passer dans différentes communautés de pêcheurs.

C’était plus compliqué de préparer l’itinéraire et les interviews que pour MMF car le projet était plus « technique ». Voici l’explication que nous avions eu en amont :

« Le projet Our Sea Our Life travaille avec six communautés vulnérables pour gérer les pêcheries locales. Le but est d’améliorer la protection des écosystèmes côtiers et le bien-être des communautés impliqués. En créant des conseils communautaires de pêche qui géreront 500 hectares d’aires marines, en développant des mécanismes financiers et en supportant les associations d’épargne des villages à investir dans des activités autres que la pêche »

Il est temps d’aller voir cela !

Immersion dans les villages

L’idée était de commencer par le village de Lalane et rencontrer Chef Ali, le leader de cette communauté. Puis passer la nuit là-bas pour se rendre le lendemain sur une île proche à la rencontre d’une communauté de pêcheurs nomades car ils étaient justement là à cette saison.

Nous sommes donc partis tôt le matin en pick-up avec du matériel de base de camping et de l’équipement que le projet apportait au village. Un dernier arrêt pour acheter l’eau pour les prochains jours, et nous voilà parti pour Lalane ! Le projet OSOL travaille avec six communautés de pêcheurs qui se trouvent dans des endroits vraiment reculés. Nous avons visité et dormi dans les villages Lalane, Quiwia et Quirinde. Rien que s’y rendre est une expérience intéressante ! Il nous a fallu 2 heures de piste à travers la savane pour rejoindre Lalane, situé à moins de 30 kilomètres de Mocimboa da Praia.

Dès notre arrivée nous avons été introduits auprès du Chef Ali et des gens du village travaillant sur le projet. Jeremy nous avait expliqué que cela serait la première fois que le village recevrait la visite de plus d’un étranger à la fois. Autant dire que nous ne sommes pas passés inaperçus !

Nous avons passé la journée à échanger avec les gens pour avoir leur point de vue sur le projet, voir les équipements dont le village disposait dans sa mission de protection et commencer les interviews. Les gens ne parlaient pas portugais ici (nous non plus d’ailleurs !) contrairement au reste du pays. Chaque village avait son dialecte, basé de manière plus ou moins lointaine au Swahili. Nous avons donc enregistré les interviews dans les langages locaux et nos questions étaient traduites par un membre du projet. Pas forcément évident de ne rien comprendre à une réponse ! Mais grâce à une traduction approximative ensuite des interviews du dialecte à l’anglais, nous avons des vidéos très intéressantes que je vous invite à regarder.

Nous avons passé la fin de la journée à faire le plus d’images possible de ce lieu unique d’un autre temps, et d’un orage magnifique qui grossissait sur la mer.

Il fallait aussi installer un campement, le village ne disposant pas de hutte libre pour nous. Après avoir essayé sans succès d’installer mon hamac entre deux huttes (et failli en casser une), j’ai opté pour une tente dans une rue du village. Ben avait été plus intelligent et avait déjà pris le seul endroit où il était possible d’accrocher un hamac.

Le diner était basique, des pâtes sans condiment ni sauce vue que nous avions oublié d’en acheter. Il y a ensuite eu une projection d’un film éducatif pour tout le village grâce au matériel amené. C’était un petit évènement car ces villages, en plus d’être parmi les plus pauvres du pays, n’ont accès ni à l’eau courante ni à l’électricité.

La journée avait été éreintante, la nuit était bienvenue. Nous avions juste oublié l’orage vu en mer, qui a finalement atteint le village. Il a été violent. En plus de me faire réveiller trempé par une tente arrachée, nous avions un autre problème. La pluie torrentielle allait rapidement rendre la piste par laquelle nous sommes venus impraticable pour le 4×4. Il fallait partir en urgence sous peine de se voir bloquer plusieurs jours. Traverser 20 kilomètres de savane à pied n’était pas une option viable non plus à cause de la faune pouvant être dangereuse.

Après avoir remercié les gens qui nous avait accueilli si chaleureusement, nous sommes donc rentrés à Mocimboa da Praia. Le projet OSOL et son bénéfice pour les communautés impliquées était clair pour nous mais il nous fallait plus d’images et d’interviews pour le mettre en avant.

Jeremy devait repartir mais il a eu la gentillesse de nous laisser avec Jamen, un biologiste marin travaillant pour AMA et OSOL, ainsi que Deuasse, le chauffeur d’AMA. Les deux venaient de cette région.

Pour une gestion locale

Nous sommes donc partis le lendemain matin avec eux pour Quiwia. La route jusqu’au village à travers la savane est magnifique et je peux faire de belles photos depuis la plateforme du pick-up. Mais Deuasse ne voulait pas que je reste trop longtemps ainsi hors de l’habitacle du véhicule à cause des animaux sauvages présents dans cette partie reculée et quasi vierge du pays. Nous n’en avons malheureusement pas vu mais l’endroit compte beaucoup d’éléphants, de lions, … Le voyage est tout de même à couper le souffle.

Arrivés à Quiwia, nous rencontrons Chef Assane qui nous explique combien il est content du projet OSOL. Le village voyait le nombre de poissons pêchés diminuer à tel point que cela en devenait inquiétant pour se nourrir. La création de réserves marines et la gestion des pêches ont eu des effets très bénéfiques sur les stocks de poissons. Ils ont même vu une espèce qu’ils pensaient disparue réapparaître. Son interview est très intéressante, je vous conseille de la regarder.

Les stocks de poissons étaient un sujet très sensible à l’époque. En 2013 d’énormes réserves de gaz naturels avaient été découvertes sur la zone. L’exploitation par des entreprises internationales devait commencer sous peu. L’approvisionnement local en nourriture était un enjeu majeur, pas seulement pour les villages mais aussi pour les milliers de personnes qui allaient venir travailler sur les sites d’extraction.

 Nous avons aussi vu la construction d’une maison du village, financée par OSOL , qui allait abriter le conseil communautaire de pêche de la communauté. C’est ce conseil qui gérera la pêche et les aires marines protégées sur sa zone.

En effet le projet OSOL s’appuie surtout sur la création de réserves marines gérées par les communautés. Des réserves permanentes où il est totalement interdit de pêcher pour protéger les espèces et les stocks de poissons, et des réserves temporaires fermés pendant quelques mois le temps que les poissons grandissent et se reproduisent. OSOL aide les communautés à mettre en place des plans de gestion. L’idée derrière tout cela est de faciliter dans un premier temps au Mozambique puis partout dans le monde la création et la gestion d’aires marines protégées par les communautés locales. L’impact sur la pêche et les prises est impressionnant d’après les pêcheurs.

Une fois les aires et la gestion en place, OSOL suit de loin et apporte un soutien matériel et scientifique.

Le dernier village

Après quelques heures passées à Quiwia, nous sommes partis pour le dernier village, Quirinde. Celui-ci est encore plus reculé que les autres. Les interviews là-bas sont allées assez vite et il restait du temps avant la nuit. Nous n’avions plus eu l’occasion de faire du sport depuis longtemps, c’était donc le moment parfait pour un footing dans la savane suivi d’un match de foot avec les villageois !

J’ai vite atteint mes limites sous cette chaleur. J’ai laissé Ben montrer nos talents français au foot et je suis allé visiter le village avec l’idée d’arriver à une plage vue plus tôt, à quelques kilomètres de là. C’était un endroit magnifique avec une mangrove d’un côté et de l’autre, plusieurs kilomètres de plage et savane. J’ai marché plus de 200 mètres dans la mer pour avoir l’eau jusqu’à la taille. Le soleil ne se couche jamais sur l’océan au Mozambique, l’ensemble de la côte étant orientée Est. Ce coucher de soleil sur la savane depuis la mer est le plus beau que j’ai jamais vu. Totalement seul, je suis rentré rapidement pour ne pas me retrouver de nuit perdue dans la savane !

Après une courte nuit en tente, nous sommes réveillés au lever du soleil par Deuasse et Jamen. Le chef du village est pressé, nous devons faire son interview avant qu’il parte pêcher. Pour nous remercier d’être venus, le chef nous a offert pour le petit déjeuner du gibier chassé autour du village. Je ne suis pas particulièrement fan de la viande de brousse mais il était difficile de refuser !

Nous avions tout ce dont nous avions besoin pour mettre en avant le travail exceptionnel d’OSOL auprès des communautés. C’était pour nous la fin du voyage. Nous sommes rentrés à Mocimbia le soir et avons pu voir Jeremy qui revenait d’un autre village.

Le lendemain commençait pour nous le long périple de Mocimboa da Praia jusqu’à Marseille ! Nous sommes revenus très fatigués par le voyage en entier qui s’est en plus achevé par une semaine dans les villages reculés mais c’était une expérience unique. Nous avons énormément appris sur la protection marine grâce à Marine Megafauna Foundation et le projet Our Sea Our Life. Je vous invite à voir nos vidéos et lire nos autres articles pour en savoir plus :

https://www.zsl.org/conservation/regions/africa/our-sea-our-life

Nous étions au Mozambique en Avril 2017. La zone de Cabo Delgado et plus précisément Mocimboa da Praia a été attaquée puis occupée par des terroristes à partir de Novembre 2017. Les autorités ont mis plusieurs mois à reprendre la zone et la menace n’est aujourd’hui pas encore totalement éliminée, l’endroit étant en zone rouge. Les exactions des terroristes ont gravement mis en péril les villages et le projet OSOL a dû être mis en pause. Je ne sais pas s’il a aujourd’hui pu reprendre.

GALERIE